Pour aller mieux, faites des heureux !

Par Guillaume Kac – 11 mai 2016

Une image de pingouins joyeux et enjoués, symbolisant la notion que rendre les autres heureux contribue à notre bien-être personnel.

Vous êtes de mauvaise humeur ? Rendez quelqu’un heureux, ça ira tout de suite mieux ! L’altruisme est-il la clé?

Les neurosciences nous apprennent que l’altruisme est la composante essentielle et malléable d’une bonne santé physique et mentale.

 Depuis quelques années, elles se sont donné pour mission de valider l’hypothèse dite du “cerveau social” : notre cerveau serait ce qu’il est parce que nous sommes des animaux vivant en grand groupe, et que la vie en société est la pression évolutive la plus importante que nous ayons rencontré au cours de notre histoire. Pour le confirmer, elles regardent donc comment notre cerveau gère les comportements sociaux, et comment ces comportements impactent à leur tour le cerveau.

L’altruisme, c’est quoi ?

Être altruiste, c’est agir pour le bien des autres même quand nous n’en retirons pas de bénéfice direct. En d’autres termes : faire le bien gratuitement. L’altruisme est donc associé à une autre faculté, l’empathie : comprendre ce que l’autre ressent, être capable de se mettre à sa place. On a longtemps cru que seul comptait la loi du plus fort et que l’empathie et la bienveillance sont juste des pratiques culturelles ou morales.

Mais c’est faux ! On constate par exemple que l’empathie n’est pas propre à l’espèce humaine. Une expérience menée par l’éthologue Frans de Waal sur des primates l’a révélé. Situation : un panier de jetons verts et rouges. Si le singe choisit un rouge, il est le seul à recevoir de la nourriture en grosse quantité. S’il choisi un vert, cette nourriture est partagée entre son groupe, dont lui. Le sujet a volontairement choisi le jeton vert pour en faire profiter tous les autres. Le primate se soucie donc du bien-être d’autrui, il a cette capacité de compassion. Et c’est aussi valable pour de nombreuses autres espèces, principalement des mammifères, mais pas que.

Cette expérience et bien d’autres ont amené les scientifiques a considérer l’empathie et l’altruisme comme des caractères importants dans l’évolution des espèces. Ce mécanisme de coopération permet à un groupe de mieux survivre. On retrouve ce cas avec des chimpanzés léchant le sang de compagnons blessés par des léopards pour les soigner, alors que cela ralentit l’avancée du groupe.

L’empathie, un héritage de l’Evolution

L’hypothèse d’une empathie construite avec l’évolution se confirme quand on regarde le cerveau. Le docteur Roland Peyron du Centre de Recherche de Neuroscience de Lyon fait partie de ceux qui ont étudié la réaction d’un cerveau en pleine empathie. Des sujets regardant simplement des images de personnes en train de se blesser activaient les même réseaux du cerveau (associés à la douleur) que quand ils souffraient physiquement eux-mêmes. Et la douleur ressentie est d’autant plus forte que l’on est proche sentimentalement de la personne qui la subit.

Alors en quoi est-ce utile d’avoir mal avec ou à la place de quelqu’un d’autre? Et bien un groupe de coopérateurs l’emportera toujours face à un groupe sans coopération. Et c’est communicatif : si une personne intervient pour une autre, d’autres le feront plus facilement. Cette “réciprocité indirecte”, à savoir “je vous aide pendant que d’autres vous aident” est une des formes de coopération liées à l’altruisme.

Plaisir de recevoir, super-plaisir de donner

Comme notre cerveau est bien fait, donner du plaisir aux autres apporterait carrément plus de satisfaction que répondre à son propre désir ! C’est le résultat d’une enquête où des personnes qui avaient reçu une même somme d’argent devaient soit s’acheter quelque chose, soit offrir quelque chose à quelqu’un. La moitié qui a dépensé pour les autres s’est montrée plus créative dans les moyens et plus contente de l’expérience.

Alors, comment développer votre altruisme pour être plus heureux de vivre ?

Déjà, on part tous avec un potentiel plus ou moins grand, selon nos expériences vécues : grandir dans un environnement insécurisant ou subir un traumatisme abîme notre faculté naturelle à l’altruisme. Mais les expériences menées ont également mis en évidence un facteur déterminant dans le sentiment d’empathie et donc le comportement altruiste : reconnaître l’autre comme faisant partie du même groupe que soit. Si l’autre est perçu comme un étranger, le mécanisme cérébral de l’empathie s’inverse et ce sont les zones de la récompense qui s’activent devant la douleur de l’autre…  Mais il se trouve que la pratique mentale de la méditation permet de développer cette compassion.

Méditer pour mieux coopérer

Des séances de méditation ont ainsi été données à des élèves d’une école primaire de Baltimore aux États-Unis, dans un des quartiers les plus violents du pays. Résultat, ils géraient plus facilement les situations de conflit et avaient beaucoup plus d’empathie pour leurs camarades. Un programme similaire a été mis en place dans une école maternelle allemande à partir des recherches de l’institut Max-Planck de Leipzig. Cela consistait en un entraînement quotidien de méditation pour les enfant, basé sur la respiration, la coopération et l’expression de la gratitude. Les effets ont été observable dès 12 semaines avec une diminution des conflits et une hausse des comportement généreux. Des plus, les enfants qui au début ne partageaient des friandises qu’avec leurs amis préférés, partageaient ensuite avec tous le reste du groupe.

Des experts de la méditation avec plus de 10 000 heures de pratique se sont prêtés à une analyse de leur activité cérébrale par des équipes de chercheurs en neurosciences.  A la surprise générale, l’imagerie fonctionnelle a montré un changement fonctionnel et structurel des zones de la régulation et de concentration des émotions. Le centre de recherche a alors adopté un slogan : Changez votre cerveau, changez le monde !

Cette souplesse du cerveau a d’ailleurs un nom : “Neuroplasticité”. Et il suffit de 30min de méditation par jour pendant 2 semaine pour changer son cerveau ! Méditer c’est aussi protéger son cerveau : stimuler la genèse des neurones et de leurs connexion…

Les avantages sont donc nombreux : meilleure attention, meilleure gestion de nos émotions, meilleure santé du cerveau et beaucoup de bien-être. Ne considérez plus le bien-être comme quelque chose de spontané, mais comme quelque chose qui s’apprend. Cela donne envie d’être chercheur en Science du bonheur !

Pour aller plus loin

Mindfulness practice leads to increases in regional brain gray matter density (Psychiatry Research Neuroimaging)

Mindfullness meditation and pain reduction (Deric’s Mindblog)

  • Matthieu Ricard, moine bouddiste, était anciennement chercheur en biologie moléculaire. Il recense quelques articles scientifique sur la méditation via son blog : http://www.matthieuricard.org/blog

Merci d’avoir lu cet article.

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